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Abbé Johann Ribette

Il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants

Ce mois de novembre est traditionnellement lié à la contemplation des fins dernières et à la prière pour les âmes des fidèles défunts. Or, il est inauguré par la fête de la Toussaint qui en donne la véritable tonalité : la gloire du ciel, le triomphe des bienheureux qui voient le Seigneur face à face et lui rendent grâce pour ses immenses bontés. Si nous prions tout particulièrement pour les défunts, c’est dans la perspective de cette joie immense que le Seigneur réserve à ses élus.


Mais au fond, en quoi consiste cette joie ? Si nous comprenons l’éternité en termes de temps infini, il pourrait sembler que le ciel n’aurait pas grand-chose de désirable. N’en aurait-on pas, à la longue, fait le tour ? Nous pourrions être trompés par cette expression que nous utilisons lors des obsèques : le repos éternel. Le fameux R.I.P, Requiescat In Pace, laisserait penser à un long temps de vacances, une grasse matinée éternelle. Or, lorsque saint Paul veut parler aux Corinthiens de son expérience mystique du ciel, il rapporte cette phrase qui nous laisse songeurs, lorsqu’il nous dit qu’il a été: emporté au paradis et […] a entendu des paroles ineffables, qu’un homme ne peut pas redire (2 Co 12, 4). Cette joie, ce bonheur, est si grand que les mots humains sont impuissants à les décrire. Il ne faut pas se méprendre sur le sens de cette expression. Le repos des Chrétiens, cette éternité à laquelle nous espérons, avec crainte et profond respect (Ph 2, 12), c’est le fait d’avoir obtenu ce que notre cœur désire de toute ses forces. Dans la philosophie classique en effet, le repos est l’état de celui qui a atteint le but qu’il poursuivait : il bénéficie de ce qu’il recherchait, et en est comblé.


Ainsi, celui qui meurt dans la grâce et l’amitié de Dieu, et est parfaitement purifié, vit pleinement uni à Dieu, qui seul peut combler pleinement nos désirs, Lui qui en est à la fois l’origine et le but. La vie parfaite avec Dieu, nous l’appelons la Béatitude, qui est un état de bonheur plus grand que ce que nous ne pourrons jamais imaginer ici-bas. Cette perspective du repos n’est par conséquent pas tant à comprendre comme un temps interminable, mais comme une intensité d’amour total, où chaque instant sera nouveau, parce que nous verrons Dieu tel qu’Il est. Par conséquent, la béatitude n’est pas un repos stationnaire, mais une véritable activité, d’après saint Thomas d’Aquin, activité consistant dans la vision, dans la connaissance intime de Dieu. L’homme y trouve sa plénitude totale. Si ces mots peuvent sembler assez secs, il importe de nous souvenir que nous ne pouvons décrire dans le langage humain cette joie qui est celle des bienheureux.


Pour parvenir à cette joie, le Christ nous a fait membres de l’Église. Cette mère aimante est déjà pour grande partie dans ce bonheur éternel, et tous ses membres, par-delà les temps et l’espace, vivent dans une étroite union. Morts ou vifs, tous nous sommes membres de la même Église, d’où ces « ponts » qui existent entre tous ses membres : les saints intercèdent pour les vivants, et les vivants prient pour les défunts qui ne sont pas encore parvenus à cette Béatitude. C’est sur ce mystère de la Communion des saints que s’enracine notre prière pour les morts. Nous voulons hâter pour nos chers défunts ce repos, cette joie, qui nous vaudra, nous le savons, leur intercession, non pas comme un renvoi d’ascenseur, mais comme l’appel à participer avec eux de cette Béatitude dont le Seigneur comble ceux qui l’ont aimé de tout leur cœur.

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